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10.09.2013

Tailler le figuier

Qu'est-ce qu'un pessimiste ? C'est un homme absolument dégoûté en philosophie, de toutes les doctrines, en politique, de tous les partis, en littérature, de toutes les écoles, en anthropologie, de tous les hommes et de lui-même, en amour, de toutes les femmes, en religion, de tous les Dieux. (Edmond Thiaudière, in La Proie du Néant)

Beaucoup de gens se plaignent de n'avoir pas ceci ou cela ; mais la cause en est toujours qu'ils ne l'ont point vraiment désiré. Ce colonel, qui va planter ses choux, aurait bien voulu être général ; mais, si je pouvais chercher dans sa vie, j'apercevrais quelque petite chose qu'il fallait faire, et qu'il n'a point faite, qu'il n'a point voulu faire. Je lui prouverai qu'il ne voulait pas être général. (Alain, in Propos sur le bonheur)

La légende veut que le jeune Siddharta Gautama, futur Bouddha, las de sa longue et vaine quête spirituelle, décida un jour de s'asseoir en méditation sous un arbre et de ne se relever qu'après avoir découvert la vérité ultime. J'en suis là, moi aussi, à ceci près que je ne suis pas assis à l'ombre d'un pipal, mais dans mon canapé. Et que je ne vois aucune vérité ultime à l'horizon. Au contraire, plus je vais et plus ma conviction se renforce qu'il n'y a rien à découvrir, pas de vérité cachée, pas de secret transcendant ; et plus ma stupeur grandit, aussi, devant le spectacle de ces masses innombrables d'êtres humains se jetant les unes contre les autres au prétexte de la vérité, conçue absolument. Qu'ils s'exterminent donc entre eux, ces pédants ! Quant à moi, ambitionnant de survivre et de prospérer, je préfère les vérités techniques, à la façon des how-to anglo-saxons. J'en fais déjà l'heureuse expérience concernant mon corps : par une méthode appropriée, je suis en train de le sculpter littéralement. La première fois que je suis tombé sur le propos d'Alain que je cite en épigraphe de cette note, j'ai trouvé qu'il y allait un peu fort : de mon point de vue, il existait tout un tas d'excuses valables pour justifier l'échec dans la poursuite d'un objectif donné. Mais en y réfléchissant plus avant, j'ai réalisé qu'Alain disait vrai. Si je prends mon cas personnel, je constate que mes supposés échecs sont dus à une démission de ma part : à un moment ou à un autre – et parfois avant même d'avoir entrepris quoi que ce soit ! –, j'ai cessé mes efforts vers le but que je m'étais fixé. En quelques occasions, un tel abandon se révèle salutaire : il permet de comprendre que le but qu'on visait n'était pas vraiment un but, mais une rêverie, quelque chose qui ne comptait pas pour soi, au fond. Mais la plupart du temps, il s'agit d'un refus irrationnel de payer le prix – irrationnel parce que rien n'est gratuit en ce bas-monde.

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