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26.02.2013

Prendre sa place

Je dois m'occuper d'être heureux. (Albert Camus, in L'État de siège)

La rencontre d'une jeune femme étonnante chez un ami, l'autre soir. De nouvelles circonstances, notamment professionnelles, qui font écho à une ancienne problématique : je manque cruellement de confiance en moi et je sabote mon propre bonheur. Comme si je ne méritais pas d'être heureux, comme si, aussi, il y avait quelque supériorité morale à n'être pas heureux, grand thème romantique qui traverse l'histoire du monde. Mais cette idée ne vaut rien. Personne ne compte les points de souffrance et aucune médaille du Juste n'est remise au plus martyr. Non, la vie passe, seulement et les malheurs frappent les sages comme les insensés, jusqu'à la mort, qui elle non plus n'en épargne aucun. J'ai relu, il y a peu, des ouvrages sur la prétendue loi d'attraction : il suffirait de désirer quelque chose pour qu'elle se manifeste. Pensée magique. Lui préférer Coué, qui a montré la puissance de l'autosuggestion, en restant dans le raisonnable, en homme de bon sens qu'il était. Prendre ma place, donc, parce que personne ne le fera pour moi. Croire en moi, en mes possibles. Et trouver mon oiseau bleu.

16.02.2013

Renuntiare

Je change, en ce moment. C'est une impression étrange, comme une lente décantation. Dieu persiste, cette fois. Ou sans doute serait-il plus juste de dire que je persiste. Mais cela sans efforts, je me sens comme emporté, enfin tourné dans la bonne direction. J'ai couché avec B., hier soir. Dès le début de la soirée et en amont même de celle-ci, j'ai su que c'était une erreur. Je n'arrêtais pas de penser à C. et j'ai vécu l'acte en lui-même comme une trahison, outre que la demoiselle ne me plaisait pas plus que ça, voire, même si c'est terrible à formuler, me répugnait, une fois entièrement exposée à mon regard. Je n'avais qu'une hâte, qu'elle parte. La nuit fut longue... Et notre séparation, expéditive. Dans l'après-midi, un malaise presque physique. Instinctivement, je me suis rendu dans une petite église de mon habitude. Pleurs des tréfonds, dans cette crypte froide et silencieuse. Puis le calme. Jusqu'à ce que je sois dérangé par deux dames jouant les touristes. La foule, ensuite. Les livres, dans le centre commercial. Une jeune femme, qui a attiré mon regard. Je n'ai pas osé l'aborder. Dommage, je crois qu'elle m'avait repéré aussi. Mais. Apprendre peut-être à tenir debout, à être un homme, un vrai, à vivre, en somme, avant de prétendre à l'amour. L'annonce de la renonciation de Benoît XVI m'a touché. Si cet homme-là, avec la charge qui est la sienne, peut renoncer, au titre de sa fragilité, alors je peux bien, moi, être insignifiant, renoncer à mon passé douloureux. Renoncer aussi à cette course folle et orgueilleuse pour avoir mieux que le voisin. Etre, tout simplement : un beau travail, déjà.

10.02.2013

A petits pas

La chose qui, entre toutes, rend si pesant le fardeau de la vie, et insoluble le problème qu'elle pose, c'est que l'on se sent toujours inégal à ce que l'on porte en soi de meilleur. Ah ! comment tous les êtres ne comprennent-ils pas qu'il n'y a pas de preuve plus valable, plus certaine de l'existence de Dieu que la présence en nous de ce meilleur que rien, jamais, ne parvient à détruire, qui subsiste au sein de toutes les faiblesses, de toutes les lâchetés, de toutes les dégradations; et n'est-il pas vrai que, quand nous sommes à notre pire, nous souhaitons que Dieu même n'existe pas, précisément, afin que ce meilleur s'évanouisse et nous laisse enfin en paix. (Charles Du Bos, in Journal, t. IX)

Peut-être y a-t-il une pédagogie de Dieu, quelque chose de l'ordre d'une patience infinie qui fait qu'Il revient à la charge autant de fois que nécessaire afin que tel ou tel être, appelé à Sa lumière, s'ouvre enfin à elle. L'autre soir, épuisé de mes tourments et à nouveau empli de cette humeur religieuse à nulle autre pareille, j'ai prié, avant de m'endormir, demandant à l'Eternel d'éclaircir ma pensée et d'apaiser mon coeur. J'ai rêvé, cette nuit-là. Comme souvent, le contexte du rêve était flou. Mais un élément précis m'est resté : je poursuivais un fin serpent, alors même que j'en avais très peur. Un temps, voilà que le serpent se retrouve derrière moi ; je me retourne, saisi d'effroi et là, je vois une salamandre à la tête entourée d'une sorte de couronne tuer le serpent en le transperçant. Je ne suis guère expert, ni d'ailleurs adepte, de l'interprétation des rêves, mais celui-là m'a suffisamment marqué pour que je m'y hasarde. Le fin serpent représente à mon sens le mal subtil qui se révèle très prégnant dans notre société et certainement en moi. Quant à la salamandre, quelle ne fut pas ma surprise de découvrir, après une recherche rapide sur le net, qu'elle symbolise la foi qui ne peut être détruite et se retrouve dans les armoiries de François 1er, sous une forme ressemblant de manière troublante à celle de mon rêve... Comme un message de je ne sais où pour me dire de garder courage, de ne pas abandonner et de ne pas céder à la tentation. Bien sûr, peut-être est-ce là tout un cinéma que je me fais à moi-même, peut-être quelque lecteur incroyant passant par là me fera-t-il la remarque que le sceptique que je prétends être n'a pu manquer de se faire, à savoir que le signe que j'ai cru discerner dans ce rêve n'y a jamais été placé que par mes soins. Peu importe. Je suis las des ratiocinations que je m'inflige à moi-même. L'âme ne vit pas de raison, mais se déploie au vent de l'inspiration. Pour autant, avancer lentement, un pas devant l'autre, en respectant mon rythme propre, qui est celui d'un être fragile, perdu, endormi ; reculant pour mieux sauter, ou bifurquant tout soudain, jusqu'au prochain réveil, des jours, des semaines ou des mois plus tard. Veiller la lumière, comme un gardien de phare prévient du naufrage.